La frontière sud de l’Europe/nord du Maroc a encore frappé.

Le 30 novembre dernier, deux jeunes Camerounais de 23 et 24 ans, surnommés « Vapeur » et « Le Bir », sont morts asphyxiés après que les forces auxiliaires aient déclenché un feu dans la grotte où ils se cachaient pour éviter l’arrestation, d’après les témoignages des personnes présentes dans la forêt au moment des faits.

 

 

"Vapeur"

« Vapeur », un des jeunes tués le 30 décembre 2015 (Source : facebook)

Deux mois après la mort de Giorgio et Olivier, voici encore deux personnes mortes lors d’opération menées au nom de la défense des frontières de l’Union européenne.

Quand l’impunité cessera-t-elle?

Les faits relatés dès le début

Le matin du 1er décembre :  (voir l’article de El Faro, le premier à ce sujet : Al menos dos inmigrantes mueren tras brutales redadas en Castillejos)
L’ONG Caminando Fronteras a dénoncé la mort d’au moins deux migrants subsahariens lors de rafles menées hier à Castillejo/Fnideq.
Les forces auxiliaires menaient ce matin-là, différentes actions pour arrêter la population subsaharienne qui habitait des grottes situées proches de la frontière maroco-espagnole, proches de l’enclave de Ceuta. L’opération aurait commencé à 10h30 du matin et se serait terminée vers 14h. Lors de ces opérations un incendie a été déclenché dans les grottes où se cachaient les Subsahariens avec l’objectif de forcer leur sortie. Au moins deux migrants sont restés à l’intérieur sans pouvoir sortir. Des témoins présents pendant les faits ont dénoncé ces agissements auprès de l’ONG Caminando Fronteras, disant qu’ils avaient vu le cadavre d’un camarade camerounais de 24 ans à l’intérieur de la grotte mais n’ont pas pu localiser l’autre camarade qui est resté à l’intérieur.

L’ONG a transmis ces informations à la CRDH de la la zone de Tanger-Tétouan ainsi qu’au consulat de Rabat.

Des dizaines de personnes sont allées voir la police de Fnideq pour que les faits soient sus, que les corps soient identifiés.

Ces témoins des faits seront plus tard arrêtés puis déplacés de force, comme tous les autres, vers la ville de Tiznit, au sud du Royaume.

Cette opération s’ajoute à celles menées les semaines passées dans les forêts coté marocain qui se sont soldées par plusieurs dizaines d’arrestations et de déplacements forcés vers la ville de Tiznit. (Voir par exemple l’article de Les Eco : De Tanger à Tiznit, pourquoi le Maroc refoule-t-il les migrants?)

En effet, la semaine d’avant les faits, la police marocaine avait délogé quasiment tous les migrants subsahariens de la zone située entre l’enclave espagnole de Ceuta et la ville de Tanger. Les sources consultées par les journalistes et organisations ont signalé que les rafles de Subsahariens, menées par les forces auxiliaires marocaines, s’étaient intensifiées ces derniers jours, avec des déplacements forcés massifs vers le sud du Maroc (notamment vers la ville de Tiznit).

 

 

Le 2 décembre,  la Plate forme des associations de migrants au Maroc a écrit un communiqué (extraits):

Suite aux événements menés par les forces auxiliaires marocaines dans la forêt de Finideq dans la journée du mardi 01 Décembre 2015 à 10h30, causant la mort par asphyxie de deux migrants subsahariens de nationalité camerounaise âgés de 25 et 26 ans.

La plate forme des associations de migrants et communautés subsahariennes au Maroc fidèle à ses objectifs, à savoir :

 

– La défense et la protection des droits des migrants

 

– Dénoncer l’injustice, le racisme, la xénophobie, la maltraitance et toutes formes de discrimination faites aux migrants.

 

A cet effet, elle dépêcher d’urgence une délégation pour s’enquérir de la situation sur le terrain, afin d’éclairer l’opinion nationale et internationale sur les exactions atroces que subissent les migrants dans ces différentes forêts de la région orientale.

 

 

Dans les jours qui ont suivi le drame, les autorités marocaines ont tenté de nier les faits. Mais un journaliste de Ceuta s’est rendu à la grotte en question et a pu faire des images des deux cadavres.
Les autorités marocaines se sont alors vues contraintes d’ouvrir une enquête. Plus tard, la préfecture de Tétouan a confirmé la mort des deux personnes, tout en déclarant que cela s’était passé «à cause d’une asphyxie suite à un feu allumé durant leur sommeil dans la grotte».
La thèse de l’accident est d’autant plus douteuse que la dite-enquête a été menée pendant que les témoins des faits étaient à l’autre bout du pays, à Tiznit, à la suite de leur arrestation et de leur déplacement forcé.

 

Certains parlent de « bavure des forces de l’ordre marocaines« , on pourrait aussi bien parler de violence d’État quant à la mort de ces deux jeunes.

 

Deux semaines après les faits, rien… Le « fait divers » ne fait plus de bruit.

 

LA FRONTIÈRE NORD DE MAROC, SUD DE L’EUROPE CONTINUERA-T-ELLE DE TUER EN TOUTE IMPUNITÉ?

Tout laisse présager que oui. Comme si ces vies que sont celles des candidat-e-s à l’immigration vers l’Europe et notamment des personnes originaires d’Afrique subsaharienne ne valaient rien aux yeux de la coopération sécuritaire Maroc-Espagne-UE : il faut sauver l’intégrité des frontières à tout prix.

 

#lacoopération.UE.Espagne.Maroc.assasine #libertédecirculation

Articles de presse :