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L’irruption de l’indignation lors du 15M (15 mai 2011) a débouché sur une remise en cause à une échelle de masse du modèle politique né dans la Transition post-franquiste du milieu des années 1970. Les critiques du modèle socio-économique et du régime politique n’étaient déjà plus le monopole de la gauche révolutionnaire. Des dizaines de milliers de jeunes et de moins jeunes se rassemblèrent bientôt sur les places aux cris de « nous ne sommes pas une marchandise des politiciens et des banquiers », « nous ne paierons pas cette crise », « nous ne devons rien, nous ne paierons rien », « ce n’est pas une crise, c’est une escroquerie », « ils l’appellent démocratie et ça ne l’est pas ».

Avec cette rébellion s’est lézardé le consensus hégémonique sur la Transition « modèle », la qualité de la démocratie en vigueur, le rôle des partis majoritaires ainsi que de la finance et de l’économie. Trois types d’éléments y ont contribué : les effets des politiques d’austérité dérivées des orientations de l’UE, la hausse du chômage et la baisse des salaires ; les scandales financiers et les multiples cas de corruption au sein des principaux partis, en connivence avec les grandes entreprises bénéficiaires de contrats publics ; et, surtout, l’immobilisme du système politique. Comme le signalait Daniel Bensaïd : « l’indignation est un début. Une façon de se lever et de se mettre en marche. On s’indigne, on se soulève, et après on voit. » Dans le cas espagnol, le mouvement a donné lieu à de nouvelles formes de lutte et de mobilisation, de nouvelles alliances et a même fini par poser la nécessité d’une intervention sur le terrain électoral.

Cinq ans et demi après l’irruption du mouvement des indignés et après le cycle électoral qui a suivi le 15M (Mouvement des indignés), qui avait permis la naissance d’une nouvelle force politique de masse anti-néolibérale (Podemos) est aujourd’hui mis a mal, notamment par des problèmes de démocratie interne et par un discours de plus en plus polissé. Les luttes et les mobilisations sociales traversent une phase de reflux, mais la crise dans l’État espagnol ne donne aucun signe d’atténuation.

En effet, les effets de la crise économique qui a débuté en 2008 ont étaient d’une grande violence sociale pour une grande partie du peuple espagnol, notamment avec l’application des mesures d’austérité : baisse des salaires, casse du service public, remis en cause du droit du travail ….

l’État espagnol représente 9,2 pour cent de la population de l’Union européenne et 11 pour cent de la population totale européenne vivant sous le seuil de pauvreté et dans l’exclusion. Les 20 pour cent les plus pauvres de la population de l’État espagnol le sont devenus durant la crise économique.

L’État espagnol est le pays qui a les plus faibles dépenses pour les services publics de la zone euro. Alors que le pays détient le plus haut taux de fraude fiscale avec le plus faible taux d’impôt sur les grosses fortunes (c’est-à-dire que les plus gros salaires paient proportionnellement mois d’impôts que les autres citoyens) de la zone euro.

C’est dans ce contexte que ma structure d’accueil, ATTAC Madrid, met un point d’honneur à combattre l’évasion fiscale et à rehausser les dépenses publiques notamment dans l’éducation et la santé.

Si le mouvement des Indignés du 15 mai 2011, les Marées et les Marches pour la dignité ont signifié le retour, à la fois, de la contestation sociale et d’un intérêt pour la politique. Sans leur existence, il serait impossible de comprendre l’apparition ultérieure des nouveaux partis et plateformes de gauche, ni le moment politique actuel dans l’Etat espagnol. Comme Teresa Rodríguez, députée andalouse et militante d’Anticapitalistas, le signale en syntonie avec les gens d’en bas, «  l’heure est venue de nouveautés politiques, nous en avons besoin ».