Caravane, yourte, cabane, roulotte ou camion : parce qu’il n’existe pas que notre bon vieux bâti… choisir son logement est un droit pourtant difficile à revendiquer.

camion HALEM

Photo : la caravane HALEM dans la Drôme

Ces 21 et 22 aout, une rencontre d’HALEM : Habitants en Logements Éphémères et Mobiles, a eu lieu dans la Drôme. Ce collectif qui se veut être un « mouvement populaire d’autodéfense qui accompagne quotidiennement des personnes souvent démunies devant les élus et l’administration » parcourt actuellement la France à la rencontre des locaux.

HALEM : et si on choisissait d’habiter …

J’ai atterri à la caravane dans le cadre de ma mission sur les travailleurs migrants saisonniers dans l’agriculture. Quels liens me direz-vous ? Les saisonniers agricoles rencontrent souvent des problèmes pour trouver un logement, pour des courtes durées, près des exploitations agricoles. Ils se retrouvent souvent sous tentes (autorisées en Drôme, mais pas en Ardèche) ou à vagabonder avec leur camion à la recherche d’une place, d’un lieu où ils seraient acceptés et disposeraient de quelques commodités.

HALEM et ses « sympathisants » (RELIER, DAL…) réfléchissent à ces modes d’habitats, aux solutions à proposer à tous ceux qui, par choix ou par contrainte,  vivent dans ces logements légers, éphémères et mobiles. « Simplifier ma vie », « chercher l’essentiel », « me loger avec mes moyens »… tant de raisons et de motivations qui poussent à sortir de l’habitat ordinaire. Ce sont tous ces HALEM que j’ai rencontré durant ces deux jours et qui m’ont ouvert à ces réflexions : Ai-je le choix de vivre comme je veux ? Où je veux ? Pourquoi devoir justifier de qui je suis et ce que j’ai choisi ? Quels sont mes droits et mes devoirs ?

Le constat marquant de ces rencontres c’est l’existence de nombreuses barrières juridiques, sociales, politiques alors que l’HALEM demande simplement à habiter.

Juridiques d’abord parce qu’obtenir le droit de poser son habitat léger sur un bout de terrain est un parcours du combattant. PLU[1], pastilles, STECAL[2], CD PENAF[3] et toutes les obligations de déclarations sur l’autonomie, la réversibilité, les enjeux de classifications des parcelles : c’est qu’il faut être juriste ou bien entouré pour s’engager dans ces démarches. Les HALEM préfèrent souvent vivre dans « l’illégalité » et la crainte.

HALEM

Photo : Acronymes et juridictions à n’en plus finir…

Sociales ensuite parce que les HALEM subissent la « phobie sociale », le rejet de la population, celle –là même qu’affrontent les gens du voyage, et autres populations nomades ou dites « marginales ». Au quotidien, ils sont obligés de présenter et justifier qui ils sont et leurs choix de vie. Prouver qu’ils ne sont pas des parasites, des nuisibles qu’on accuse de « mitage »[4] mais de simples citoyens qui choisissent de vivre selon leurs aspirations ou possibilités…

Politique enfin : face à l’ « arrogance des institutions », le collectif réfléchit aux façons de défendre ensemble de droit d’habiter. Paulo, militant de la cause et habitant de Bussières-Boffy, rappelle que le PLU doit « satisfaire sans discrimination les besoins présents et futurs de l’ensemble des modes d’habitats »[5].

HALEM Drôme : « Occuper intelligemment »

Cette année, la caravane d’HALEM s’est arrêtée dans la Drôme à l’Oasis de Serendip : un lieu créé par 9 personnes dans l’esprit des Oasis de Pierre Rhabi. Nourrie par une réflexion éthique, l’Oasis se veut un lieu de production (agroforesterie et permaculture), d’accueil (touristique) et d’échange (ferme pédagogique).

L’un des objectifs est de monter un collectif local, un certain nombre d’habitants ayant émis le souhait de créer un groupe afin de suivre les affaires locales et de défendre des modes d’habitats éphémères, mobiles et libres. Cette envie a notamment été exprimé lors de la caravane 2015, qui s’est déroulée à Saillans, une commue qui à décider de faire « Autrement ». Lors des dernières élections municipales, une liste collégiale y a été élue, dont le but est une gouvernance participative des citoyens.

halem tente

Photos : Discussions, échanges et propositions, 3 jours de partage dans la Drôme.

Parmi les décisions des commissions de travail, celle de réviser le PLU intéresse les membres du collectif. Face au besoin de certains HALEM de régulariser leur situation, la commune a décidé de revoir entièrement son PLU et pense à y intégrer l’accueil de saisonniers agricoles en habitats mobiles ! C’est cette démarche d’accompagnement des élus vers l’accueil des logements alternatifs que souhaiteraient encourager les militants locaux. Parce que les habitants d’HALEM veulent occuper mais « occuper intelligemment » (propos de Francky, membre fondateur).

[1] Plans Locaux d’urbanisme

[2] Secteurs de Taille et de Capacité d’Accueil Limitées

[3] Commissions Départementales de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers

[4] Ce mot désigne la multiplication de résidences dans un espace rural, mais dont la racine vient du terme miter « être attaqué par des mites ».

[5] Article Article L121-1 du Code de l’Urbanisme