montenegro

Rapide présentation du contexte

Le Monténégro, faisant autrefois part de la République Fédérale Yougoslave, est indépendant seulement depuis 2006. Au lendemain de la chute de Tito et du remodelage des frontières dans les Balkans, le Monténégro fait partie de la Serbie. Suite à un référendum, il a récemment acquis son indépendance dans un climat que l’on pourrait qualifier de pacifique. Comme sur l’ensemble de la planète, et particulièrement dans les Balkans, les frontières étatiques ne correspondent pas à la répartition géographiques des différentes « ethnies ». En effet, bien que la différence entre l’identité serbe et l’identité monténégrine soit floue (car non appuyée par une différence confessionnelle), le nombre de monténégrins en Serbie (800 000) est supérieur à la population totale du Monténégro (670 000). Malgré sa petite taille, sa « composition ethnique » est diverse : une moitié monténégrine et une autre moitié composée de serbes, de croates, d’albanais, de bosniaques (-iens), et de populations rroms.

Depuis 2010, le Monténégro est officiellement candidat à l’adhésion à l’Union Européenne. Sa monnaie est de facto l’euro. En effet, d’importantes réserves de devises – réserves provenant du fait que le Monténégro a longtemps été une plaque tournante du marché noir en Europe, particulièrement le marché des cigarettes – ont permis au gouvernement d’injecter suffisamment de liquidités en euro pour que celle-ci devienne effectivement la monnaie utilisée.

La vie politique monténégrine est ancrée sur une forte tradition clanique. Les classes politiques et entrepreneuriales se divisent selon leur appartenance familiale. Une situation où les « lignées sanguines » déterminent fortement les conflits sur les scènes politiques et commerciales. Corruptions et arrangements entre amis sont pratiques courantes chez les dirigeants : le président Milo Dukanovic serait le 9ème homme d’État le plus riche de la planète selon le classement du magazine Forbes (rappelons ici qu’il y a moins d’un million d’habitant dans le pays).

Malgré un récent essor de l’activité touristique, appuyé massivement par les politiques gouvernementales, la population monténégrine reste relativement pauvre (560 euros de salaire moyen) et une partie importante est sans emploi (15%). La jeunesse est particulièrement concernée par les problèmes économiques affectant le Monténégro. Un régime dominé par les jeux de pouvoir entre les clans, la corruption des dirigeants et l’absence de perspectives économiques font que l’émigration est parfois considérée plus adaptée que la mobilisation citoyenne pour résoudre ses problèmes. C’est a ce problème majeur que l’association d’accueil ZID essaye de répondre au travers de différents programmes.

Zid et l’AEC

 

L’association Zid, issue de mouvements étudiants, existe depuis le début des années 90. Elle à pour objectif de créer des dynamiques de lutte cosmopolites, il s’agit ici de promouvoir une participation citoyenne qui dépasse les divisions ethniques. Par le biais de nombreux programmes et projets Zid cherche à inciter les individus à s’organiser, à lutter, à réclamer leurs droits et propose une réflexion nouvelle sur les notions de citoyenneté et d’identité. La zone des Balkans reste une zone fortement divisée par les conflits identitaires, Zid représente une alternative émancipatrice de la société civile, une alternative pour la paix et la « sécurité humaine ». Aujourd’hui, Zid n’est plus une organisation étudiante mais conserve une importante proximité avec la jeunesse.

La participation de Zid aux programmes d’Échanges & Partenariats s’inscrit, entre autres, dans cette logique. Zid se consacre à « former » la jeunesse, elle entend par cela créé des liens entre les jeunes, des liens qui ne soient pas ethniques, des liens sources d’échanges et d’apprentissage mutuel. En effet, considérant le Monténégro comme relativement exclu du réseau associatif transnational, lors de ces dernières années, Zid à accueillie une trentaine de jeunes volontaires provenant de pays étrangers. Zid s’attache également à organiser des conférences, des débats, des moments de réflexions et de discussions auxquelles peuvent participer les jeunes monténégrins.

Zid est rattaché au réseau Helsinki Citizen Asembly (HCA) – dont l’Association Européenne des Citoyens (AEC) représente la section française – qui relie différentes organisations, du Caucase jusqu’au Balkans, traitant des problématiques liées aux conflits, à la paix, à l’identité, aux nationalismes, à l’exclusion, au racisme…depuis l’année 1990. Le réseau permet à différentes organisations, plus ou moins éloignées, de se connaître et de pouvoir échanger sur les situations auxquelles elles font face et sur leurs manières de lutter (il me semble important de noter, que des associations serbes et bosniennes étaient en contact pendant la guerre en Bosnie). Lutter pour la paix c’est résister aux idéologies de guerres, aux constructions d’images d’ennemies, aux logiques d’exclusion et de discrimination, aux atteintes aux libertés. Le mouvement dispose d’une certaine expérience qui nécessite d’être diffusée. « La paix n’est pas donc pas seulement la fin d’une guerre […], elle se nourrit de la connaissance de l’autre, de ses valeurs et de ses usages, de la rencontre de ou avec l’autre » .[1]

A cette logique pro-active de lutte pour la paix s’intègre la participation de Zid à un projet financé par l’Union Européenne de réflexion sur la notion de « sécurité humaine » auquel participent nombreuses associations – principalement membres du réseau HCA – et instituts de recherche – dont la fameuse London School of Economics. Cependant, Zid est encore en période de réflexion sur la nature des activités qu’il souhaite développer. Mon rôle lors de la mission, connaissant la langue anglaise, sera alors de réfléchir avec les membres de l’association à la posture et la manière d’agir vis-à-vis de ce projet au sein du réseau HCA. D’une manière plus large, il semble important de renforcer les liens de Zid avec les mouvements de solidarité internationale dans les pays des Balkans mais surtout avec les autres pays européens. Zid est une association qui dispose d’une importante expérience, elle est une des principales associations de la « société civile » du Monténégro. Sa lutte pour la paix sociale dans une région « divisée » depuis la guerre est source d’apprentissage pour l’ensemble des mouvements sociaux. Confronter sa lutte à d’autres expériences est nécessaire pour l’ensemble des mouvements de solidarité internationale. N’oublions pas, le savoir n’est que partage.

 

[1]   Fondation Frantz Fanon, « L’héritage de Mandela : la voie vers un avenir commun de paix et de solidarité »