* Haïtiens de la diaspora, tenez bon!

  • Anne, à 26 ans, ta vie prend-elle le tour que tu imaginais?

Oui et non. Plus jeune, j’ai voulu être avocate, puis juge des enfants. Mais au cours des mes années de droit, mes envies ont changé. J’ai fait un stage à la Ligue des Droits de l’Homme et j’ai découvert la réalité des immigrés en France et le traitement que leur réserve l’Etat français, qui m’a révoltée. A la suite de ça, je me suis spécialisée en Droits de l’Homme et plus particulièrement sur les questions de migration, dans l’idée de pouvoir mettre un jour mes compétences au service de structures défendant les droits des migrants en France. Ce que j’ai fait au cours de deux stages, au Groupe d’informations et de soutien aux immigrés (Gisti) et au sein du programme « Personnes déracinées » à la section française d’Amnesty International.

  • Si tu devais montrer une photo de l’année 2011, qu’y aurait-il dedans ?

Dans ma photo de l’année 2011, il y aurait une rue de la ville de Port Principe avec un tap-tap (transport public en Haïti), très coloré et bondé sous un soleil de plomb. Cette photo reflèterait bien mon quotidien, puisque j’ai habité à Port au Prince pendant un an. J’ai été envoyée comme volontaire du service civique par une association française, le Collectif Haïti de France, au sein d’une association haïtienne, qui s’appelle le Groupe d’Appui aux Rapatriés et aux Réfugiés (GARR). Le GARR est une association haïtienne qui travaille depuis 20 ans à la promotion et à la défense des droits des migrants haïtiens, notamment ceux se trouvant sur le sol dominicain. L’objectif de ce partenariat était de créer un nouvel axe de travail sur le mouvement migratoire haïtien vers les territoires français et ce dans le but de mieux connaitre ce mouvement et de participer à l’avancée des droits des migrants haïtiens en France, en dénonçant le traitement des Haïtiens par l’Etat français et en agissant directement auprès des Haïtiens eux-mêmes en les informant sur leurs droits.

  •  Et maintenant qu’est-ce qui t’attend?

Et bien, c’est reparti pour une année haïtienne ! L’idée est de continuer à travailler sur le même projet en se concentrant sur le transfert de compétences et la pérennisation du projet au sein du GARR. L’année dernière, nous avions concentré nos forces sur la sensibilisation de la population haïtienne dans les zones de partance pour la France par le biais des diverses activités (campagne radio, pièce de théâtre…). Il s’agit à la fois de renseigner les gens sur les conditions d’émigration en France (demande de visas, arrivée en France, démarches en préfecture) et également sur l’importance du droit à l’identité. Une fois, arrivés en France, les Haïtiens rencontrent  beaucoup de difficultés dans leurs démarches administratives du fait de leur état civil.

Cette année, je voudrais continuer cette sensibilisation, mais plus insister sur l’aspect accompagnement juridique. Nous voulons former des juristes du GARR au droit des étrangers français pour qu’ils soient capables d’aider les gens depuis Haïti sur ces questions, mais aussi former des membres de la communauté haïtienne en Guadeloupe. Une formation leur permettrait de comprendre ce que c’est d’avoir un droit, de pouvoir le revendiquer, et puis d’un autre coté de les informer sur les démarches administratives en matière de droit au séjour. L’autre aspect de la mission sera de faire en sorte que le GARR s’empare du plaidoyer pour dénoncer le traitement des Haïtiens  par l’Etat français, notamment en matière d’état civil !

Interview réalisée par Ana