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Le CETI n’apparaît pas sur la carte des camps de Migreurop, en effet, les migrants peuvent y rentrer et sortir (presque) à leur guise, pourvu que ce soit entre 7h et 23h. Et après avoir apposé sur le portail d’entrée leur carte électromagnétique ainsi que leurs doigts afin de vérifier leurs empreintes digitales.

Mais à Ceuta, ce n’est pas au CETI que sont enfermés les migrants mais bien sur l’enclave elle-même. Coincé entre 8 kilomètres de frontière de barbelé de 6 mètres de haut qui sépare le territoire espagnol de son voisin marocain et les 14 kilomètres de mer qui sépare l’enclave de la péninsule ibérique.

Les sorties se font à la discrétion du Ministère de l’Intérieur, et il y a deux possibilités : l’expulsion vers le pays d’origine ou le « laisser-passer », c’est-à-dire le permis de passer sur la péninsule, mais sans aucune garantie, donc toujours sans papier et « expulsable » à tout moment.

Le CETI n’est pas considéré comme un « Centre d’Internement des Etrangers » (CIE), donc ici, pas de durée maximum autorisée (en Espagne, la durée maximum légale de séjour en CIE est de 60 jours). Les migrants attendent ici un minimum de 6 mois avant de pouvoir espérer « gagner » le laisser-passer qui leur donnera enfin le droit d’aller chercher une vie meilleure en Europe. Je dis bien 6 mois minimum car certains sont ici depuis bien plus longtemps.

C’est notamment le cas de S. un nigérian qui après avoir vu sa demande d’asile refusée, a été convoqué au commissariat pour sa déportation en CIE (Centre de rétention espagnol). Depuis, il ne dort plus au CETI mais en forêt, au cas où la police viendrait le chercher en pleine nuit comme elle a l’habitude de le faire lorsque que sont prévues des expulsions. Avec l’accord tacite du directeur du Centre, il n’y rentre que pour manger et se doucher. Et cela fait maintenant deux ans que la situation n’évolue pas. Sans travail ni famille à Ceuta, ils sont 7 dans cette situation, vivant dans la peur d’une expulsion vers leur pays d’origine, dormant en forêt été comme hiver.

Ou encore B, guinéen, qui voit les laisser-passer défilés depuis 8 mois sans jamais qu’un seul lui soit attribué. Et quand il se rend au commissariat pour demander à ce qu’on l’informe de sa situation, on lui conseille d’aller attendre au CETI sans lui donner plus d’explication.

Et enfin D, Ivoirien, en demande d’asile depuis 2 ans, à qui ce statut lui permet  normalement une libre circulation sur tout le territoire espagnol mais à qui on refuse son passage sur la péninsule. Lui aurait normalement le droit de travailler à Ceuta mais les 30% de chômage et la méfiance envers les immigrés font que toute recherche d’un emploi est vaine.

Ou encore A, algérien, qui a demandé l’asile pour échapper à une expulsion vers son pays. Comme il sait que cette procédure le bloquera ici pour longtemps. Il se rend donc chaque jour au port de commerce pour observer les allers et venues des camions qui embarquent pour la péninsule, bien décidé à forcer le destin en se cachant sous un des véhicules, espérant échapper au contrôle policier et atteindre la péninsule.

Ces 4 cas ne sont que des exemples parmi d’autres, et que ce soit dans l’enceinte du CETI ou au commissariat, le conseil juridique est réduit au minimum. La désinformation est un outil bien utile pour le gouvernement espagnol afin de pouvoir faire comme bon lui semble avec le destin de ces hommes et femmes en transit. Rien n’est routinier au CETI, la situation évolue sans cesse, ce qui fait que personne ici ne sait exactement quel sort lui sera réservé.