Aujourd’hui en Bosnie-Herzegovine lorsque l’on a affaire a l’administration on se retrouve face a un questionnaire dans lequel il faut se déclarer suivant son ethnie : « S » (Serbe), « B » (Bosniaque), « H » (Hvart : Croate) ou bien « autre ». Pourtant un grand nombre de personnes vivant en Bosnie se sent et souhaite se déclarer comme Bosnien de Bosnie, habitant de la Bosnie, citoyen de la Bosnie.

Aleksander, la trentaine vit à Sarajevo depuis toujours. Il est né d’un mariage mixte : son père est Serbe, sa mère est Croate. Il n’est ni Serbe, ni Croate. Il n’est pas Bosniaque. Il est Bosnien et se sent bosnien. Il est d’ici, vit ici en Bosnie-Herzégovine.
Aleksander est athée. Il n’appartient a aucune communauté religieuse et ne se reconnait dans aucune d’entre elles.
Aujourd’hui il n’est pas reconnu dans son pays. Il fait partie d’une minorité discriminée qui n’a pas un égal accès aux droits et a la vie politique.
Aujourd’hui en Bosnie le suffrage universel se décline selon l’appartenance ethnique des votants et des représentants : les habitants de la Fédération Croato-Musulmane votent pour un représentant Croate et un représentant Bosniaque lors des élections présidentielles. En République Serbe de Bosnie seuls les représentants Serbes peuvent se présenter et être élus par les habitants de la République Serbe de Bosnie. Et les autres? Les autres, ceux qui ne se déclarent pas, ceux qui revendiquent leur droit d’être Bosnien, citoyen de la Bosnie, de « nationalité bosnienne »?
Ceux la ne peuvent pas se présenter aux élections et ne peuvent donc pas représenter leur pays. Ils ne peuvent pas avoir accès à ce niveau de l’Etat.

En 2006, deux hommes appartenant tous deux a deux autres catégories de minorités en Bosnie, un Bosnien Juif et un Bosnien Rom, ont saisi la Cour Européenne des Droits de l’Homme concernant cette discrimination. En décembre 2009 la Cour donna droit aux plaignants. Il incombe aujourd’hui a l’Etat de Bosnie-Herzégovine de changer sa Constitution pour faire disparaitre ces discriminations sous peine d’être exclu du Conseil de l’Europe, ce qui rendrait impossible l’entrée dans l’Union Européenne du pays.