A Libramont, dans le sud de la Belgique a lieu chaque année, fin juillet,  « la Grande Foire agricole de Libramont ». Rassemblement incontournable pour tous les agriculteurs conventionnels du pays, d’autant que cette foire est un des salons agricoles à ciel ouvert les plus grands d’Europe sinon du monde. Ils vont, outre y échanger des coups à boire, présenter leurs bêtes ainsi que leurs tracteurs. N’espérez pas y voir des démonstrations de pratiques paysannes alternatives. Ici, tout fait l’éloge du modèle agro-industriel : depuis l’exposition de tracteurs et autres moissonneuses batteuses toujours plus gros, toujours plus performants jusqu’à la mise sur un podium du taureau le plus volumineux, le mieux stéroïdé, en passant bien sûr par les nombreuses discussions autour des produits phytosanitaires qui assureront la meilleure récolte.

Cependant ce modèle ne représente pas l’entièreté du monde agricole, certains ne recherchent pas la rentabilité au détriment de tout le reste, certains ne veulent pas étendre leurs terres encore et encore. Certains refusent les intrants chimiques. Afin de donner une visibilité à cette partie oubliée de la profession, il y a 6 ans était créée, par une initiative paysanne, « la Petite Foire » sur le même site que « la Grande Foire » comme pied-de-nez à l’agriculture conventionnelle.

La Petite Foire avait, alors, la volonté de présenter le travail de la paysannerie à taille humaine. Faire des démonstrations de récoltes non mécanisées, proposer des alternatives aux produits chimiques, etc.

Aujourd’hui, 6 ans plus tard, la Petite Foire a évolué. Elle a quitté le site de Libramont pour s’installer à Semel (un village à 5 kilomètre de la Grande Foire) sur les terres de la ferme des Buffl’Ardennes ; une ferme qui produit, entre autre, de la véritable mozzarella au lait de bufflonne et ce n’est pas que je veuille faire de la publicité, mais quand c’est bien, c’est bien et là … bein c’est très bien.

La Petite Foire a grandi aussi mais sans jamais perdre sa ligne de conduite : mettre en avant une paysannerie locale à taille humaine et réfléchir sur l’avenir d’une agriculture qui soit respectueuse de la terre ainsi que de ceux qui la travaille.

Si vous venez visiter la foire, vous pourrez à loisir vous balader entre les stands des artisans qui proposent des produits régionaux ou vous arrêter pour regarder une démonstration de tonte de moutons et voir les différentes idées déjà appliquées pour revaloriser la laine, perçue depuis quelques décennies comme un déchet.

Vous pourrez également assister à une démonstration du maréchal-ferrant et voir comment préparer un cheval pour qu’il puisse tirer la charrue qui servira à récolter les pommes de terre du champ.

Si vous souhaitez vous informez, pourquoi ne pas aller s’asseoir à l’espace conférence et assister à la projection d’un film ou à un débat. Les thématiques sont variées et ne manqueront pas de susciter chez vous questionnement, réflexion et inspiration.

Si vous voulez vous divertir, les jongleurs, mimes, fanfares et groupes de musiques ne manqueront pas de satisfaire votre envie de rire et de sauter partout.

Bien sûr, tout cela donne faim et soif. Vous apprécierez alors un bon repas à « l’espace miam » composé uniquement de produits frais et locaux ou un petit moment détente au bar en savourant une bonne bière fraîche ou un jus de fruit équitable.

 

La foire dure un weekend et du début jusqu’à la fin, elle est placée sous le signe de la convivialité, de la solidarité et de la générosité. Toutes les bonnes volontés se mettent en œuvre pour assurer la réussite et la bonne ambiance de l’événement.

J’ai moi-même découvert l’événement l’année passée à la faveur d’un article dans un quotidien national et je m’y suis inscrit en tant que bénévole. L’expérience fut pour moi un tel plaisir grâce à l’investissement et à la chaleur des gens que j’y ai rencontré que j’ai réitéré, les yeux fermés, cette expérience cette année avec une petite subtilité en plus.

Puisque le MAP organise la Petite Foire et est à l’origine du projet de mise en réseau des acteurs de la biodiversité cultivées du BENELUX, nous avons décidé d’organiser deux conférences afin de profiter d’un large public pour le sensibiliser à l’importance de créer des liens entre les acteurs et de favoriser les échanges de savoirs et de savoir-faire.

 

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La première conférence-débat a eu lieu le samedi et était introduite par un film « Quand le vent est au blé ». Ce film prend pied dans la vie de paysans artisans qui travaillent pour produire un pain de qualité à partir de blés anciens. Nous découvrons leur quotidien, leur joie de produire un pain de qualité mais aussi le défi de refuser les méthodes de productions conventionnelles afin de travailler en accord avec soi-même.

A la fin du film, nous avions prévu une heure pour que le public puisse poser des questions, échanger des réflexions avec les intervenants et la réalisatrice du film. Nous avons alors assisté à un très bel échange qui a duré bien plus longtemps que l’heure prévue grâce à un public curieux et interpelé.

Le dimanche, nous organisions un débat sur le thème de la production de semences maraîchères de qualité et comment structurer un réseau. Nous avions comme intervenants pour ce débat : un maraîcher, une maraîchère qui depuis cette année organise un réseau de producteurs de semences et un paysans qui depuis plusieurs année a intégré un réseau des acteurs de la filière pain.

Le débat a débuté par un questionnement autour des impératifs de production des maraîchers et cette grande interrogation ; comment dans un réseau regroupant différents travailleurs, assurer que chacun produise des semences avec le même niveau d’exigence et de qualité. J’ai à nouveau été surpris, agréablement surpris cela va sans dire, de constater que ces thèmes interpellent et que le public s’approprie ces questions. Ce qui a donné à nouveau lieu à un très chouette échange entre nos intervenants et le public.

Ces deux conférences ont été pour moi très positives car elles nous ont montré qu’il y a une réelle prise de conscience au niveau de la population, des enjeux de la production et que ce sont des thèmes qui ne sont plus strictement réservés à des joutes idéologiques entre agriculteurs mais qu’ils ont bien intégré toutes les couches de la société. La question « d’où vient que je mange ? » est sur toutes les lèvres et le slogan « le juste prix pour le juste produit » interpelle dorénavant, ce qui me rend optimiste pour le futur.

A l’image de ces deux conférences, la Petite Foire fut une rencontre riche et agréable pendant lequel se sont succédé les bons moments et qui s’est clôturé comme elle a commencé dans la joie et la bonne humeur nous laissant dans l’attente de la prochaine édition.

 

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