Difficile d’aller à l’encontre des clichés lorsqu’un sudiste s’en va décrire le grand nord. J’annonce y aller sur la pointe des pieds car ce ne sont pas deux semaines qui vont me permettre d’en saisir tous les charmes et malheurs, mais je peux au moins en esquisser certaines spécialités.

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Maison bourgeoise à l’ancienne

Le plat pays donc, la Flandre ! Alors oui, c’est plat, ça cultive de la betterave et du choux fleur (parait que ça a besoin de beaucoup d’eau !), les briques rouges ou jaunes selon la richesse du propriétaire initial marquent les murs des ruelles qui vont traditionnellement de la cathédrale des nobles à l’abbaye des abbés ou au monastère des moines.

Ça nous mène rapidement à la bière. Car en effet, même si la fermentation de céréales remonte à des dizaines de milliers d’années (Ninkasi est la déesse de la bière déjà au XVIII eme siècle avant J-C en Mésopotamie, ça s’invente pas!), le brassage à base du malt, aromatisé au houblon a bien été popularisé par nos chers moines. Et ça, aujourd’hui dans le nord, ça se sent ! Bien sûr la région nord pas de calais ne boit pas que de la bière, elle reste en effet 3éme consommatrice de pastis au niveau national… Néanmoins, je ne connais pas beaucoup d’endroits ou l’on peut se donner le luxe de commander une triple karmelite dans une simple friterie (snack local), c’est quand même la grande classe. Bon, bien sûr on la boit pas en terrasse heiiin ??! Et bien pas forcement, j’ai en effet croisé presque autant M.Soleil que M.Gris, et si le vent glacial local n’est pas de sortie la veste peut rester à la maison, même en plein mois de février.

Au niveau des locaux, il reste aussi difficile d’aller à l’encontre des clichés. Les gens du Nord, on ne les comprends pas très facilement (peut être l’effet Emmaüs?), mais la gentillesse et la simplicité sont deux de leurs qualités qui sautent aux yeux à première vue.

Bien sûr, dans le nord il y a la misère, comme partout en France vous me direz. Si on sort les statistiques, c’est un peu plus présent ici puisque nous sommes dans la seconde région la plus pauvre de France avec 19,5 % de ses habitants qui vivent sous le seuil de pauvreté en 2014 (dans les 800 euros par mois) contre une moyenne nationale de 14 %. Il y a la très très très grande précarité, ceux qui n’ont pas de chez eux, pour qui le 114 des hébergements d’urgence les a tant de fois refoulés (7 fois sur 10 en France ! ) que la survie ne tient qu’à l’espoir de vivre des lendemains plus cléments ; Il y a ceux qui ont un toit mais pas beaucoup plus. Celle par exemple qui arrive tant bien que mal à payer son loyer mais dont il ne reste que 3 euros pour se soigner, trouver un boulot… et encore une fois survivre. A ce sujet, j’ai appris que la banque alimentaire qui est en partie alimentée par les surplus de la Politique Agricole Commune et qui distribue gratuitement des denrées à diverses associations a de fait réduit les coûts de stockage des produits qui étaient autrefois jetés… On peut remercier l’ami Coluche pour l’idée …

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Le grand grand luxe : un ingénieux chauffage à base de tonneau recyclé pour la cabane de réunion

Dans le nord il a aussi tous ces migrants qui rêvent de passer en Angleterre, et s’activent tous les jours, tous les soirs, sur un parking ou à même la route lorsque le trafic est embouteillé, pour rentrer dans un camion, avant que la police ne les chasse à coup de gaz lacrimo. Enfin je parle de migrants (qui a d’ailleurs une sacrée connotation nan?) en parlant de ces gens, mais le terme de réfugié est sûrement plus approprié. Ce sont des Soudanais, des Kurdes, Afghans, Syriens qui quittent leurs pays pour des milliers d’euros, dans le but d’éviter la répression politique, ethnique ou même la terreur de Daech. Si loin mais si proche cet « Etat islamique » ( Une organisation des plus affreuses qui possède notamment les principales ressources de pétrole et de céréale d’Irak c’est bien ça ??) parait être l’un des exemples qui montre toute l’hypocrisie de notre politique migratoire. On dénonce la terreur de cet « état » comme le mal absolu sans pour autant en assumer ses conséquences. Enfin bon je m’emballe sans savoir. Quoi qu’il en soit c’est une bien triste réalité de voir dans quelles conditions ces gens sont abandonnés. Ces terrains occupés, situés à proximité d’axes routiers stratégiques ne sont pas en France. C’est une autre réalité qui habite les « jungles » ou plutôt la « jingle », le « bois » en pachtoun ( langue d’un groupe ethnique dominant d’Afghanistan). Dans ce bois comme ils disent, on retient surtout les conditions de vie désastreuses, la boue, les cabanes en palette ou des tentes, sans sortie d’air (attention la fumée quand ça cuisine…) ni isolation, sans même une borne à eau… et ne parlons pas bien sûr de l’absence d’électricité, d’aide juridique, ou de la violence imposée par la mafia locale… Une seconde spécificité qui m’a marqué est le calme des gens, le respect qui règne entre les différentes communautés et leur accueil des personnes extérieures.

Bien heureusement, face à la fuite des pouvoirs publics, d’autres gens sont en soutien à ces réfugiés, des motivés, organisés ou pas, qui leur offrent un peu de réconfort, à manger, une douche, un petit pas grand-chose mais qui marque un grand témoignage d’humanité… en échange d’un thé afghan, ou d’une omelette kurde … on se demande pourtant combien de temps cette situation va perdurer si la réponse qui est donnée ne reste qu’entre les mains d’une poignée de citoyens.

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Dans la banda du Carnaval de Malo

Sinon dans le nord ça fait fait aussi la fête. Et pour montrer ça rien de tel que le Carnaval !

Des tarés déguisés en folles qui font les fadas, faut le voir. Une grande fête populaire ou tout le monde sort de chez soi, bien alcoolisée pour une partie, défilant « serrés comme des sardine » avec des parapluie, une jupe et des chaussures de sécurité pour ne pas se faire piétiner, et en chantant des chansons payardes. Bon bien sûr c’est bien plus que ça, il y a les codes, les rites qui accompagnent les bals et les bandes en faisant référence à une culture locale et qui en font même pleurer certains d’émotion. Quoi qu’il en soit les folles journée qui accompagnent ce carnaval, qui tient ses racines aux fêtes d’adieux que donnaient les marins-pêcheurs à leurs femmes avant de parti en mer, réchauffent le cœur et le foie !!!

Comme trait d’union de ces différents moments passés dans ce beau pays, et des suivants qui s’annoncent, rien de tel qu’une belle citation annonçant la marche à suivre : « la vie est plus belle que la prudence », de M. l’abbé Pierre bien sûr !