Entretien de départ avec Mikele – Mission Confédération Paysanne, Lot-et-Garonne

Originaire du Pays Basque Nord, j’ai toujours considéré l’engagement politique et militant comme essentiel. Mes études en sciences politiques puis en droits de l’Homme, plusieurs mois passés en Turquie mais surtout mon implication dans diverses associations de défense des droits des étrangers m’ont permis d’appréhender les problématiques relatives aux migrations et aux frontières, ainsi que l’inadéquation des politiques mises en place par les pays européens. Je souhaite à présent travailler sur des enjeux connexes en m’engageant à la Confédération Paysanne, un syndicat agricole porteur d’une vision alternative, qui se bat contre le modèle dominant d’une agriculture industrialisée et mondialisée. Outre la défense des droits sociaux des travailleurs saisonniers étrangers, cette nouvelle expérience me permettra de participer à la promotion d’une agriculture paysanne, ici et là-bas.

Mikele, peux-tu nous parler d’un événement, récent ou pas, qui a marqué ton engagement personnel ?

J’évoquerais les événements de Gezi en 2013 en Turquie. Il s’agissait d’une mobilisation très forte qui a été portée par une partie de la société turque, surtout par la jeunesse, contre la décision du gouvernement de détruire le parc de Gezi à Istanbul pour en faire un complexe commercial. J’avais déjà vécu deux ans en Turquie auparavant. Mais c’est à ce moment là que j’ai pris conscience que toute une frange de la société turque n’acceptait plus ni l’islamisation, ni la marche forcée vers le capitalisme promues par un régime autoritaire. Les défendeur-es de Gezi, issu-es de milieux divers, ont été victimes d’une forte répression qui, dans un premier temps, n’a fait qu’amplifier le mouvement. Ce qui m’a marqué, outre la faiblesse des réactions européennes, ça a été la force du mouvement à poursuivre la lutte malgré la répression, la diversité des acteurs impliqués et des initiatives qui ont émergé, comme les activités proposées dans le parc pendant l’occupation, ou la tenue régulière d’assemblées citoyennes.

Peux-tu à présent me parler d’un film ou d’un livre qui t’a également marqué ?

Je viens de terminer Naissance d’un pont, de Maylis de Kerangal. J’ai beaucoup aimé la richesse de l’écriture et le rythme qui structure le roman. Mais au-delà de ça, la force de l’ouvrage vient surtout du fait qu’à partir d’un événement a priori banal, la construction d’un pont suspendu quelque part aux Etats-Unis, l’auteure croise les destins d’une multitude de personnages qui renvoient aux différences de classes sociales,d’opportunités et de parcours de vie. J’y ai surtout perçu la dénonciation d’un système capitaliste qui promeut le toujours plus, quelque soient les conséquences aux niveaux écologique et social.

Une chanson que tu voudrais évoquer ?

Je voudrais vous faire découvrir le groupe de rap basque 2zio qui propose des textes très engagés sur des enjeux sociaux et sur des problématiques politiques en Pays Basque. Je pense par exemple à la chanson « Euskal Herria ez da salgai » (le Pays Basque n’est pas à vendre). Elle traite de la spéculation foncière au Pays Basque, qui a des effets dévastateurs et freine l’installation des jeunes et des populations les moins aisées dans leur pays d’origine.