L’homme est dans une petite camionnette rouge, le son de sa voix amplifié par un mégaphone m’arrive aux oreilles du bas de ma rue. Une musique de fond, et l’homme qui scande « SDP, SDP1… »  puis des mots que je ne peux comprendre.

Les élections prochaines animent la ville de Tuzla, aujourd’hui le soleil rayonne. L’été joue les prolongations par ici. Vers 13h le soleil est à son apogée et les rues sont remplies.

La campagne bat son plein. Les stands des partis politiques ont poussé comme des champignons au milieu de la ville.

Le 7 octobre auront lieu les élections locales en Bosnie-Herzégovine. Les citoyens du pays sont appelés à élire leur maire et leurs conseillers municipaux. C’est le temps de la campagne, des affichages publics des candidats à la course, des articles dans les journaux, des discussions autour des élections au café et au bureau.

Pourtant seulement 53% de la population de Bosnie-Herzégovine ira voté lors de ces élections.

Ici, comme ailleurs, on se demande à quoi cela sert de voter dans un système où les élus ne mettent pas en place les réformes promises, qui ne respectent pas la parole donnée à ceux qui les ont porté à la place qu’ils occupent aujourd’hui.

En Bosnie en se demande aussi et surtout : et puis, pour qui voter?

Pour qui voter quand tous les partis politiques en course sont presque tout des partis nationalistes? Pour qui voter lorsque l’on n’est ni Serbe, ni Bosniaque, ni Croate, mais un peu de tout cela? Pour qui voter lorsque l’on se sent et que l’on se définit avant toute chose comme Bosnien ou Bosno-Herzégovinien? Seul le SDP est un grand parti prônant les valeurs du « temps de Tito » : « promotion » des mariages mixtes, égalité des droits pour tous quelque soit l’origine ethnique. De petits partis d’ouverture se développent également actuellement mais n’ont évidemment pas la même visibilité que les partis traditionnels dominants la scène politique.

Au final ces élections n’auront pas réellement changé la donne. Les partis traditionnels dominants ont de nouveau remporté les élections. A Sarajevo le SDA, « parti bosniaque » a gagné. Dans la grande majorité des villes de Republika Srpska le SDS2 a remporté les élections. Banja Luka reste aux mains du SNDS3, le parti de Milorad Dodik, premier ministre de la République serbe de Bosnie-Herzégovine. Dans plusieurs villes du sud du pays c’est le Le HDZ4, parti nationaliste croate, qui l’ a emporté.

A Tuzla le maire SDP a été réélu. Le SDP défend des valeurs de démocratie, d’égalité entre citoyens quelques soient leur « origine », leur « ethnie ». C’est le seul grand parti non-nationaliste du pays, bien qu’on ait pu lui reprocher un rapprochement avec le SDA suite à sa victoire aux élections générales en octobre 2010. Ce qui a déçu plus d’un citoyen et peut très certainement expliquer que, mis à part dans la ville de Tuzla, ce parti soit largement en baisse dans le reste du pays.

1 : SDP : Parti social démocrate à la formation multhiethnique

2 : Parti Démocratique Serbe

3 : Alliance des sociaux démocrates indépendants

4 : Union démocratique Croate. Parti nationaliste démocratique chrétien