Dans le contexte mondial de privatisation de la police et de la guerre, G4S (Group 4 Security) occupe une place importante. L’intérêt pour les Etats est double : D’une part, faire baisser le nombre de morts commis par les armées dans les conflits, en déléguant se sale boulot à des entreprises privées. D’autre part, déléguer à une multinationale la persécution des migrants et des pauvres en général permet de « lui confier toute la chaîne d’activités ». Ainsi, une personne sans papiers originaire d’Irak peut être arrêtée en Grande-Bretagne par G4S, détenue dans un camp contrôlé par G4S, expulsée par G4S, et interpellé par G4S à son arrivée en Irak. En Suède, un « délinquant » peut être arrêté par G4S, détenu dans une maison d’arrêt gérée par G4S, jugé par un tribunal de G4S, et condamné à un travail « d’intérêt général » … au service de G4S.
 
Bien sûr, le nom de l’entreprise résonne tristement pour ceux qui s’intéressent aux crimes commis par les multinationales, avec la complicité des Etats. Ainsi, alors que le 12 octobre 2010, Jimmy Mubenga, a été tué par G4S lors de son expulsion d’Angleterre vers l’Angola, la Court de Justice de Londres n’a pas poursuivi l’entreprise, en dépit de nombreux témoignages à propos de la violence utilisée lors de son expulsion. En Palestine occupée, l’entreprise s’occupe de l’arrestation de militants politiques en Cisjordanie, puis de leur transfert et de leur détention dans les prisons israéliennes.
 
D’une certaine manière, cette transversalité dans l’oppression est l’occasion de créer des convergences. C’est ainsi que s’est constitué un collectif anti G4S, regroupant des personnes qui n’avaient jusqu’alors pas eu l’occasion d’agir ensemble. La conférence de fondation s’est tenue à Sheffield au début du mois d’octobre. Étaient notamment présent plusieurs mouvements antiguerres, des groupes anticapitalistes, ou des associations de solidarité avec les migrants. A la suite de cela, 12 octobre 2012 le matin, pour les 2 ans de la mort de Jimmy Mubenga, s’est tenu un rassemblement devant les bureaux de la Court de Justice qui a refusé de poursuivre G4S. L’après midi, se tenait un rassemblement devant les locaux de G4S à Victoria, dans la cadre de la campagne BDS (Boycott, Désinvestissements, Sanctions) en soutien au peuple palestinien.
 
La coalition anti G4S peut par ailleurs saisir plusieurs opportunités : Premièrement, G4S a une très mauvaise image auprès de beaucoup de personnes, en raison de sa défection de dernière minute aux derniers Jeux Olympiques, où elle était censée « assurer la sécurité ». Si l’accusation d’ « incompétence » ne dit pas grand chose des enjeux en présence, cette affaire peut être intéressante dans la mesure où elle pointe plusieurs « conflits d’intérêt ». Il a en effet été révélé qu’une partie du gouvernement britannique était au courant de la future défection de G4S, et a protégé ses dirigeants. Secondement, l’entreprise est très peu appréciée par beaucoup de policiers, qui craignent pour leur travail … Ainsi, lorsque des militants de Corporate Watch ont occupé début juillet le toit du siège de l’entreprise, situé dans un quartier encore contrôlé par la police britannique, celle-ci a refusé de venir déloger les militants. Au delà de l’anecdote, l’exploitation de ces contradictions peut être une des conditions des luttes présentes et à venir …