Pour cette première brève je voulais écrire quelque chose de léger, raconter ma découverte de la ville de Skopje et de la République de Macédoine. Mais c’est fou comme en très peu de temps, les choses peuvent s’accélérer dans la vie et prendre une autre tournure.

Hier, en fin d’après-midi, j’ai appris qu’aujourd’hui, j’allais me déplacer à la frontière nord de la République de Macédoine. Je reviens donc du camp de Tabanovce, à la frontière serbo-macédonienne. Et maintenant, me voilà installée confortablement devant mon ordinateur, à écrire ces quelques lignes. Mais ce soir, tout ce confort autour de moi a un goût plutôt amer. Et c’est le bordel dans ma tête… des images, des rencontres, des paroles, des sourires, des observations et beaucoup de questions et sentiments contradictoires s’entrechoquent.

Il fait froid, c’est l’hiver, hiver rude cette année. Vous avez peut-être vu les articles sur la situation des migrants dans les îles grecques ou à Belgrade ou encore à Paris. Mais cet hiver rude ne s’arrête pas aux frontières de certains Etats ou de certaines villes. Ailleurs aussi, il fait froid et c’est l’hiver.

A Tabanovce, ce sont des dizaines de familles, bloquées ici depuis la fermeture des routes des Balkans, il y a bientôt un an, qui sont en train d’affronter ce froid. Conteneurs blancs sur sol de glace, attention les yeux, ça pique.

Ici, plus que l’attente, c’est le blocage qui se ressent partout. Et le pire, c’est que ce blocage ne semble plus indigner ni révolter personne… A durée indéterminée, il s’éternise, se banalise, rentre dans la normale, à l’écart des regards extérieurs. Et rien ne change.

Et ça fait peur aussi car en écrivant ces mots, je me rends compte que j’écrivais déjà les mêmes en parlant de Ceuta et Melilla.

Heureusement, il y a le « Mercy Café » où l’on peut aller réchauffer les corps et les cœurs autour d’un café, d’un thé ou d’un chocolat chaud, avec ou sans sucre, avec ou sans lait. S’évader un instant, penser à autre chose, partager des sourires et des éclats de rire.

Je n’ai pas la solution, là tout de suite. Sentiment d’impuissance qui m’envahit un instant. Puis ce besoin d’écrire pour laisser une trace, témoigner, ne pas lâcher. Ne serait-ce que pour ces personnes qui elles, sont restées bloquées là-bas.