Premières ambiances à Kiev

Premier samedi soir à Kiev, les rues autour de la place Maïdan sont piétonnisées, la musique est partout car des jeunes ont apporté leurs enceintes et dansent autour. Bars, restaurants et magasins sont ouverts jusque tard, et en ressort une impression de vie et l’arrivée des beaux jours. Place Maïdan : le cœur de la ville. Maïdan, nom lu et relu, entendu et ré-entendu depuis 2014, depuis la révolution de la dignité, associé au changement et à ses victimes. Ce samedi soir de mai Maïdan est paisible, avec des touristes et des vendeurs de souvenirs ambulants.

Place Maïdan

Et puis ici et là, des affiches en mémoire des morts de Maïdan, d’Oleg Sentsov réalisateur ukrainien et prisonnier politique emprisonné en Russie, un homme passe plutôt jeune avec une seule jambe – surement une blessure de guerre me dit ma colocataire. Les impressions s’entremêlent déjà.

Et les premières histoires racontées par les gens que je rencontre, défenseurs des droits de l’Homme : le tournant de 2014, l’organisation sur le Maïdan, les pertes et la résilience face au conflit, les interrogations suite à l’arrivée du nouveau président Volodymyr Zelensky élu le 21 avril dernier et sur ce qu’il va faire pour le pays, la colère suite au mandat de Petro Poroshenko et à l’augmentation de la corruption dans le pays, les futures élections parlementaires à l’automne.

Premières ambiances aussi au sein de l’ONG dans laquelle je vais travailler ces cinq prochains mois, le Center for Civil Liberties (CCL) qui se spécialise sur les droits de l’Homme en Ukraine et la libération des prisonniers politiques ukrainiens.

Et, immédiatement mise dans le bain dès la première semaine, avec la participation à la coordination de deux actions organisée par le CCL à Kiev pour demander la libération d’Oleg Sentsov, et des marins ukrainiens capturés dans le détroit de Kertch en novembre 2018.

La première marche pour Oleg Sentsov s’est organisée le 10 mai, soit cinq ans après son arrestation, avec deux groupes d’étudiants ukrainiens qui ont été rencontrer des diplomates de 14 ambassades membres du Conseil de l’Europe, afin d’apporter symboliquement une lettre à transmettre à leur propre ministre des Affaires étrangères. Cette lettre retrace la situation d’Oleg Sentsov et des prisonniers politiques ukrainiens en Russie et demande à ce que le dialogue ne soit repris avec la Russie au sein du Conseil de l’Europe, qui se réunit la semaine prochaine à Helsinki avec les ministres des Affaires étrangères des Etats membres, que lorsqu’ils seront tous libérés.

Autre action menée le lendemain devant l’ambassade de Russie à Kiev, pour demander la libération des marins du détroit de Kertch. Devant l’ambassade 24 bateaux aux couleurs du drapeau ukrainien ont été accrochés, représentant les 24 marins capturés, avec la présence de militants des droits de l’Homme et des journalistes. Plusieurs Ukrainiens ayant du fuir les régions en guerre ont témoigné de la situation dans le Donbass et en Crimée, et un moment de silence a été fait pour les victimes du vol MH17 Malaysia Airlines abattu à l’Est de l’Ukraine en 2014.

C’est donc avec l’impression de vivre ici depuis déjà un mois, annonçant une mission riche en découvertes, que je clôture cette première semaine !