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Espagne / Justice sociale et écologique / Mobilisations citoyennes /

Eurovegas, No !
5 avril 2012 par Lucie

Mobilisation devant le gouvernement régional

Mercredi 4 avril 2012, Esperanza Aguirre, Présidente de la Communauté de Madrid - le gouvernement régional, Ana Botella, Maire de Madrid, et José Manuel Soria, Ministre de l’Industrie, du Tourisme et du Commerce, ont chacun reçu une lettre de la part d’un groupe de citoyens membres de divers collectifs, organisations et mouvements sociaux tels qu’Ecologistas en Acción ou les Assemblées de quartiers.

L’objet de cette lettre, le projet de construction d’Eurovegas, un complexe de jeux, loisirs et tourisme similaire à ceux du Nevada aux États-Unis et de Macao en Chine. A première vue, la proposition de Sheldon Adelson, seizième fortune mondial à la tête de Las Vegas Sands Corporation, devrait pourtant être accueillie les bras ouverts pas la société civile espagnole acculée par le chômage (23%) et la récession de leur économie.

Car ce n’est pas moins de 261 000 emplois, soit deux fois plus que n’en a jamais créé le secteur touristique madrilène, que Sheldon Adelson promet de générer en moins d’un mois. Le magnat multimillionnaire promet d’investir dès le départ plus de 18 milliard d’euros, de quoi faire aussi miroiter les gouvernements locaux et national étranglés par les dettes. Ces derniers -en tête la région de Madrid et de Catalogne- salivent et redoublent d’efforts à coup de surenchère pour attirer les faveurs de l’américain et se voir attribuer le projet.

Et pourtant des citoyens se mobilisent depuis la connaissance du projet pour le faire annuler. Réunis au sein de la plate-forme Eurovegas, no !, ils dénoncent l’absence de transparence sur les négociations en cours entre les autorités publiques et l’entreprise américaine ainsi que les conséquences sociales, économiques et environnementales. Qu’on se s’y trompe pas, le conservateur républicain ne s’est pas transformé en un fervent altruiste venu sortir l’Espagne du marasme économique dans lequel elle s’embourbe. L’éventail de conditions exigées de la part de l’investisseur est tel qu’il aboutirait, en cas d’entrée en vigueur, à la création d’un véritable « état d’exception ».

Monsieur Adelson exige

Voici quelques mesures sommées par Las Vegas Sands Corporation :

- l’exonération totale de tout impôt pendant deux ans, et des avantages fiscaux pendant 10 ans sur la TVA et sur la taxe sur le jeu, ainsi qu’une réduction de 50% sur l’impôt sur les activités économiques.

- la modification de la loi relative au blanchiment de capitaux. Un léger changement législatif dit essentiel à la facilitation des transferts de fonds par les gros joueurs. D’après des informations émanant du département d’état américain et révélées par Wikileaks, ce serait davantage pour favoriser la mise en place d’intermédiaires dits junkets ayant un lien directement ou indirect aux Triades.

- la modification des lois relatives au statut des travailleurs et des étrangers. Au nom de la flexibilisation, il s’agit surtout de permettre des nationalisations massives et de garantir un accès à un travail pas cher.

- la cession gratuite de terres (minimum de 6 millions de m²) aujourd’hui déclaration protégées, et, si nécessaire, expropriation des propriétaires de terres supplémentaires, au frais de la municipalité bien entendu.

- la construction d’infrastructures de transport public (accès du TGV, plusieurs arrêts de métro, et un hélicoport). Toujours au frais du contribuable.

- la modification de la loi du sol afin que l’entreprise puisse polluer et détruire légalement l’environnement par la construction de bâtiments démentiels.

- la non application des lois relatives à la santé publique telles que celle qui interdit de fumer dans les lieux publics.

- l’autorisation d’accès pour les mineurs.

Et pour finir, l’entreprise aurait requis que le gouvernement investisse la modeste somme de 25 millions d’euros. Pour cela, un prêt auprès de la Banque européenne d’investissement serait nécessaire.

On comprend mieux que si le PP fait des ronds de jambe pour séduire l’américain, ce n’est pas du goût de tout le monde. Tout d’abord, de tels changements législatifs seraient hors de question pour tout autre investisseur. Ensuite, les charges financières publiques imposées seraient tout simplement révoltantes et signes d’un grand mépris des citoyens espagnols à qui on exige déjà de payer une dette qui n’est pas la leur. En outre, seuls des riches touristes étrangers viendraient profiter (certains diront se compromettre dans l’alcool, la prostitution, et autres plaisirs interdits) des 12 hôtels avec 36.000 chambres, des six casinos, des théâtres, et des trois terrains de golf. Outre une augmentation des émissions de CO2 provenant des transports, le nombre massif de touristes prévus et l’ampleur des infrastructures laisse présager une explosion de la consommation d’électricité. Enfin, et je m’arrêterai là bien qu’il serait possible de poursuivre, les exemples états-uniens et chinois laissent présager seulement 34000 emplois, ultraprécaires qui plus est.

Eurovegas, No !

La plate-forme Eurovegas, No ! A donc toutes les bonnes raisons de dénoncer ce type de projet, symbolique du capitalisme sauvage et financier, et socialement et environnementalement injustes et non-soutenables. Et une fois n’est pas coutume, les citoyens espagnols ne sont pas les seuls à protester contre ce projet qualifié d’ « aberrant et d’insulte aux citoyens » par Ecologistas en Acción. Tous les autres partis politiques dénoncent à tour de rôle l’opacité, la duperie, l’insécurité promise, ou encore, comme c’est le cas de l’Union Progrès et Démocratie, les risques de dérégulation totale avec la création d’une “république indépendante type Jeuxland”. Les experts du Ministère des Finances avertissent eux-mêmes du risque de dérive en « un foyer de blanchiment d’argent » et « paradis fiscal ». José Maria Mollinedo, secrétaire général de leur syndicat Gestha [1] alerte : « que l’Espagne n’agisse pas comme un pays sérieux est un très mauvais signal pour les autres investisseurs ».

Mobilisée devant les locaux des autorités en charge du dossier, la plate-forme a donc réitéré hier sa demande de moratoire immédiat sur ce projet, d’une période d’analyse publique des méfaits sociaux, économiques et environnementaux, et la publication des études d’évaluations d’impacts menées par les trois structures publiques. Ils exigent que soient rendus publics « les données traitées dans la négociation », données qui ne sont disponibles qu’à travers « les médias et quelques interventions publiques des représentants de l’entreprise américaine ». Ils soulignent enfin « l’obligation de signaler ces questions » aux citoyens et leur nécessaire implication dans la prise de décisions sur des projets de l’envergure d’Eurovegas.


Notes

[1] ce syndicat compte 5000 membres du corps des Finances qui compte 8000 fonctionnaires



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