La libéralisation du régime des visas, l’augmentation des contrôles frontières, font de la Serbie un pays de transit dont il est de plus en plus difficile de partir aujourd’hui. Parallèlement, la répression étatique en Grèce fait que de moins en mois de personnes tentent la voie maritime pour rejoindre les côtes italiennes et rejoindre l’Europe de l’ouest. De ce fait, un nombre sans cesse croissant de personnes passent par les Balkans dont une grande partie se retrouvera bloquée en Serbie. Pays qu’Ela s’apprête à rejoindre pour sa mission avec le réseau Migreurop.

Comment as-tu connu le réseau Migreurop ?

Durant l’année 2011 j’ai passé pas mal de temps à Calais où je participais aux actions de No Border. Là bas je suis tombée sur le rapport de Migreurop « Les frontières assassines de l’Europe ». Je me suis plongée dans la lecture de ce rapport et j’ai très vite été intéressée par ce réseau. Une amie m’a parlé d’Échanges et Partenariats et de cette mission dans les Balkans avec Migreurop. Comme je suis originaire de cette région et que je parle le slovène et le serbo-croate je me suis dit que je devais tenter ma chance pour cette mission.

Et avant 2011, où étais-tu et que faisais-tu ?

Jusqu’à mes 16 ans j’habitais à Ljubljana (Slovénie). Après avoir quitté Ljubljana j’ai pas mal bougé : d’abord nous avons déménagé à Bruxelles avec mes parents, puis je suis partie faire des études de philosophie en Angleterre. J’ai ensuite vécû une vie nomade durant deux ans. Mes différents projets m’ont conduit à passer pas mal de temps en France, en Belgique, au Danemark, en Slovénie et en Angleterre.

Toi qui as fait des études de philosophie, qu’est ce qui t’a amenée à t’intéresser à la question du droit des étrangers et à partir avec Migreurop ?

J’ai toujours été intéressée par ce sujet car quand j’étais petite ma mère donnait des cours de français et de slovène aux enfants réfugiés qui venaient de Bosnie durant la guerre des années 90. J’avais 6 ou 7 ans et je me rappelle avoir passé beaucoup de temps avec ces enfants qui étaient tout comme moi sauf qu’eux avaient vécu la guerre et parfois avaient tout perdu jusqu’à leurs parents. Cela m’a beaucoup marquée. J’ai également remarqué à l’époque que beaucoup de Slovènes avaient des préjugés envers les réfugiés de Bosnie. Je me souviens avoir passé plusieurs week ends dans le centre d’accueil des réfugiés où ma mère était bénévole. Je m’y amusais beaucoup avec les enfants, alors forcément quand je retournais à l’école le lundi et que j’entendais des discours de rejet de « ces étrangers » je n’arrivais pas à comprendre pourquoi les autres ne voyaient pas que les enfants bosniaques étaient les mêmes gamins que nous !

Quand j’avais 13/14 ans j’ai entendu parler de la situation des réfugiés dans le centre ouvert d’accueil pour les demandeurs d’asile à Ljubljana. J’ai alors commencé à y aller. Je me rendais dans le centre 2 fois par semaine. Je jouais avec les enfants et leur apprenais le slovène. Je voulais comprendre leurs conditions de vie dans le centre. Je me suis vite fait des amis avec qui nous avons partagé de nombreux beaux moments. C’est également à ce moment que j’ai commencé à me questionner sur les raisons qui poussent certaines personnes à quitter leur pays et sur le traitement qui leur était réservé en arrivant en Europe, sur les questions de frontières et de la construction d’une forteresse Europe.

C’est à ce moment que j’ai commencé à m’interroger sur le lien entre le système capitaliste et les politiques migratoires.  Aujourd’hui c’est le lien entre les systèmes sécuritaires européens, les fermetures des frontières et la mondialisation subordonnée à l’accumulation de capitaux qui est au cœur de mes réflexions. C’est pourquoi j’ai hâte aujourd’hui de partir avec le réseau Migreurop en Serbie, pour me rendre compte de la réalité là-bas, et des conséquences de la fermeture des frontières européennes qui font de la Serbie actuelle un pays de transit dont il devient de plus en plus difficile de partir.

La libéralisation du régime des visas, l’augmentation des contrôles frontières, font de la Serbie un pays de transit dont il est de plus en plus difficile de partir aujourd’hui. Parallèlement, la répression étatique en Grèce fait que de moins en mois de personnes tentent la voie maritime pour rejoindre les côtes italiennes et rejoindre l’Europe de l’ouest. De ce fait, un nombre sans cesse croissant de personnes passent par les Balkans dont une grande partie se retrouvera bloquée en Serbie. Pays qu’Ela s’apprête à rejoindre pour sa mission avec le réseau Migreurop.

(Interview par Viviane.)