Habeas Corpus

Tribunal de La Valette, en un jeudi matin ensoleillé.

Un avocat, une magistrate, des représentant.e.s des services de détention et de l’agence nationale en charge des demandeur.euse.s d’asile. Une femme doit être libérée de l’enfer, ici nommé Safi, car elle y est détenue illégalement depuis plusieurs mois. La magistrate s’indigne : c’est la 7ème fois cette année que le tribunal est saisi pour ce genre d’affaires.

Pour le gouvernement, il est hors de question qu’elle sorte, qu’elle soit dans l’espace public, visible par la société maltaise. Car aussi ahurissant que cela puisse paraître, Malte pense encore pouvoir lustrer une vitrine supposément respectueuse des droits humains, et craint que chaque personne libérée de l’enfer de Safi ne brise cette vitrine. En disant la vérité.

Avant d’entrer dans la salle d’audience, un garde lui ôte les menottes. Ses vêtements sont un peu déchirés, vétustes. Elle a l’air à la fois inquiète et pleine d’espoir. A mesure que l’interprète lui traduit la décision, elle se met à sourire timidement sous son masque.

Quelques heures auparavant, elle croupissait dans ce qui s’apparente à une cage, à côté de l’aéroport international. Symbole insupportable de cruauté : depuis cette cage, elle pouvait entendre des avions décoller et atterrir sans fin.

La magistrate demande à l’avocat ce qu’il souhaite « déclarer », l’avocat de répondre :

« I want a declaration that she’s a free woman ».

Fin de l’histoire. Informée de la frilosité du gouvernement à l’idée de sa sortie, elle n’avait cessé de répéter « I don’t care if I’m homeless. I want to come out ».

Ce soir, elle a pu quitter Safi, mais elle est toujours prisonnière de cette île qui ne veut pas lui donner de protection. 

Une goutte d’espoir dans un océan d’injustices innommables.

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