Quand on lui demande qui il est, Kin répond « je suis moi »… une manière d’éviter l’enfermement identitaire, de dépasser les frontières ? Allez on pagaie, on pagaie… terre ferme à l’horizon ! Quelques interrogations finiront par laisser apercevoir toute l’humilité qui anime notre militant parisien ! A l’abordage…

Est-ce que tu pourrais nous expliquer un peu le parcours qui t’as mené à militer pour les droits des migrant-e-s ?
Outch ! (il souffle un peu)…Au départ, je voulais rentrer dans la machine d’Etat, bosser pour les ministères et changer les choses de l’intérieur. Du coup j’ai intégré Sciences Po à Paris. Là je me suis rendu compte que finalement ce que je pensais vouloir faire n’était pas vraiment ce que je voulais faire. J’ai pris conscience des limites de ce que l’on pouvait faire à l’intérieur de l’appareil d’Etat. Après un passage express en master « affaires publiques », j’ai intégré un master recherche sur les questions de migration et de genre tout en suivant des cours d’Arabe.

Est ce que tu pourrais nous éclairer sur le lien entre ce que tu aimes dans la vie et tes engagements militants ?
J’ai toujours aimé voyager, et j’ai vécu dans beaucoup de pays différents. C’est justement parce qu’il m’est difficile de concevoir que d’autre ne puissent circuler et vivre où ils le veulent que je m’intéresse aux frontières et aux droits des étrangers.

Tu souhaites que les gens puissent "traverser les frontières", qu’entends tu par là ?
Il y a les frontières physiques entre les États, mais ce ne sont pas les seules à devoir être franchies. Une fois qu’elles sont passées, il y a le racisme, la ségrégation, les logiques d’invisibilisation des populations qui visent à ne pas faire reconnaitre leurs droits. C’est pour ça que je me suis intéressé aux droits des étrangers, mais également parce que c’est souvent ce qui arrive en dernier dans les préoccupations des gens et de la politique. Aborder ce sujet, ça permet aussi de faire un peut de tout : droit au logement, au droit de la famille, aux questions de genre, etc.

Peux-tu nous citer trois lieux/pays et ce que tu y associes ?
● San Diego – Californie . Le mur de la frontière avec le Mexique. J’habitais juste à côté en 2005…c’était vraiment un sentiment étrange, oppressant…Le mur s’étale sur des kilomètres et s’enfonce dans la mer…Un symbole puissant ! Je ne pouvais m’empêcher de penser qu’il y avait suffisamment de frontière dans les esprits pour ne pas avoir a en rajouter d’autres sous forme physique et si violente !
● Le Caire-Egypte . Les frontières intérieures. J’y ai donné des cours de français auprès de jeunes Soudanais qui souhaitaient émigrer au Canada, ce que seuls un nombre infime arrivait à avoir le droit de faire via le HCR. J’ai aussi pris conscience du racisme qui pouvait exister contre les Soudanais en Egypte et qui créait des logiques d’exclusion. Cela m’a montré qu’il pouvait exister des frontières aussi à l’intérieur des pays. Je reste néanmoins persuadé qu’elles peuvent être dépassées par le biais des échanges, et d’interconnexions quand ils sortent des préceptes utilitaristes.
● Frontière sud –Mexique/Guatemala . Les migrations des Honduriennes vers le Mexique. J’y suis allé a plusieurs reprises lors dans le cadre de mon travail de recherche. Là je me suis rendue compte que dépasser une frontière physique et politique ne permettait pas pour autant de dépasser les frontières de l’être et du conditionnement, notamment en ce qui concerne les mécanismes de domination sexistes.

Une pensée ?Un espoir ?
« Aucun filet ne capture la mer »

Une chanson qui t’a marqué ?
Gil Scott Heron « The Revolution will not be televized », qui est plutôt un slam et qui mène à s’interroger sur les révolutions sur la rive sud de la Méditerranée qui ont eu lieu grâce aux technologies de télécommunication...