Taala Hooghan Infoshop, une organisation militante – #2 Save the Peaks

Depuis plusieurs années une lutte est en cours dans le nord de l’Arizona, près de la ville de Flagstaff. Cette région abrite en effet les « San Francisco Peaks », des montagnes sacrées pour plus de treize tribus indigènes, ce qui n’a pas empêché la compagnie Snowbowl d’y construire des pistes de ski alimentées par de la neige artificielle.
Cette bataille contre l’occupation d’un site sacré à des fins commerciales ne date pas d’hier. Dès les années 1930 des blancs ont commencé à aller skier sur cette montagne, et c’est en 1969 que la proposition de construire une véritable station de ski (avec remontées mécaniques, commerces etc.) a émergé. Malgré la résistance de la communauté, l’autorisation a été donnée en 1979 par le service national des forêts et les travaux ont débuté l’année suivante. Un agrandissement s’ensuit ensuite en 1997 et, pour pallier au manque de neige, les propriétaires de la station proposent de l’alimenter en neige artificielle grâce aux eaux usées de la ville. Un contrat de 20 ans est alors signé entre Snowbowl et la ville de Flagstaff qui s’engage à vendre une grande partie de ses eaux usées à la compagnie[1].
Le problème écologique posé par cette situation est plus qu’évident : 20 ans, cela correspond à 13,6 milliards de litres d’eau usées recyclés répandues sur un écosystème montagneux fragile. 13,6 milliards de litres d’eau dangereuse pour l’environnement et la santé puisqu’il est en principe illégale d’ingérer de l’eau usée recyclée que ce soit par la bouche mais aussi les yeux, les oreilles ou la peau. Pour la recycler, on y ajoute en effet de nombreux produits pharmaceutiques, cancérigènes, des hormones etc., tous extrêmement nocifs pour la santé.

 
Mais en construisant sa station sur une montagne sacrée, Snowbowl a ajouté au problème environnemental celui du colonialisme et du génocide culturel. Cette lutte est emblématique de la situation subie par les peuples autochtones dans la région et partout dans le monde. La construction de Snowbowl c’est le saccage d’un site sacré pour le profit d’une minorité. Tout le monde s’indignerait si quelqu’un s’avisait de verser l’eau des égouts dans une église, mais la remise en cause du droit religieux des minorités lui se fait dans le plus grand des silences.
Pourtant depuis le début les militants de Taala Hooghan essayent de briser ce silence en luttant contre Snowbowl et contre le contrat signé par la ville de Flagstaff.
Leur combat prend plusieurs formes. Ils interviennent ainsi régulièrement dans les conseils municipaux de la ville (ouverts au public) pour mettre la maire et ses conseillers face à leurs responsabilités et leur demander d’annuler ce contrat. Ils organisent également des manifestations pour dénoncer Snowbowl et ses conséquences.Et ces militants ce sont pas prêts de s’arrêter. Deux nouvelles manifestations ont eu lieu depuis le mois décembre. Une première le 20 décembre 2017 lors de laquelle une trentaine de manifestants ont défilé directement sur les pistes de ski en chantant des slogans pour interpeller les skieurs et dénoncer Snowbowl. Puis, il y a 2 semaines, ce sont près d’une soixantaine de personnes qui ont manifesté, dans le centre-ville de Flagstaff cette fois-ci, avec la volonté d’interpeller la municipalité (une conseillère municipale soutenant la manifestation est d’ailleurs intervenue), d’être visible auprès des habitants de la ville, mais aussi de dénoncer les entreprises qui font du commerce et qui soutiennent ouvertement Snowbowl. Le cortège s’est donc arrêté à plusieurs endroits de la ville pour désigner et dénoncer ces magasins qui profitent eux aussi d’un génocide culturel pour s’enrichir, en finissant son parcours devant la mairie.

Cette lutte dure depuis près de cinquante ans et continuera tant que Snowbowl sera toujours là. Parce que n’oublions pas que, comme à Notre Dame des Landes, c’est grâce à la lutte que les victoires sont permises.
[1] La station de Snowbowl est la seule au monde à n’utiliser que de l’eau usée recyclée pour fabriquer sa neige artificielle.